Cérémonies

Dernièrement, nous avons déménagé dans la maison, à savoir que mes deux garçons ont maintenant chacun leur chambre au sous-sol et que ma salle à massage se retrouve désormais à l’étage. Alors que mon conjoint me parlait des plans pour le réaménagement du sous-sol, je me suis rendue compte que j’avais une grande réticence face à ce changement, qu’il symbolisait en quelque sorte la fin d’une période, que je laissais derrière moi définitivement mes bébés et que je dois réapprendre maintenant à être la maman d’un petit et grand garçon.

Et pour faciliter cette transition, et parce que j’ai de la difficulté à vivre librement mes émotions, je me suis créé une cérémonie afin de marquer cette transition dans ma vie, marquer le fait que mes fils changeaient d’état, et que quand je me réveille la nuit, je ne les entends plus être dans la chambre à côté de la mienne, leurs mouvements me rappelant leur présence, le fait qu’ils soient encore là.

Peut-être avez-vous pris part à une  cérémonie ou rite récemment? Il est fort probable que oui, plusieurs de nos gestes quotidiens sont imprégnés d’un sens commun (les poignées échangées lorsqu’on rencontre une personne pour la première fois sont un exemple parmi tant d’autres) tandis que les cérémonies « traditionnelles » tel que le christianisme nous les proposent servent à marquer la naissance, le mariage/la vie adulte et souligner le décès d’une personne.

Quel est le rôle d’une cérémonie, rite de passage, ou célébration?

Les rites de passages traditionnels que nous connaissons sont principalement le baptême, le mariage et les rites funéraires, mais il fut une période dans l’histoire ou l’on en célébrait plusieurs autres, les plus connus étant vraisemblablement les rites de passages à l’âge adulte, tant pour les jeunes hommes que jeunes femmes. Cela étant dit, à quoi peuvent-ils bien encore servir de nos jours? De façon vraiment très concise, elles servent principalement à marquer le temps, avant la cérémonie et après la cérémonie en plus de permettre aux participants de laisser aller, changer ou guérir et d’amener avec eux ces transformations dans leurs quotidiens. Au cours de l’été ma famille a reçu l’annonce du décès d’une personne proche de nous. Alors que les préparatifs s’organisaient pour les funérailles, dans un premier temps, il ne devait pas vraiment y avoir de cérémonie, de services et quoique ce soit s’approchant d’un service funéraire « officiel », il est apparu clairement que des funérailles structurées, dans un salon funéraire, étaient nécessaires afin de nous offrir un espace pour que nous puissions vivre librement nos émotions et de faire nos derniers adieux. La tenue du service funéraire  nous a permis de marquer ce passage, de nous aider à faire la transition et réaliser que la personne était bel et bien morte.

Cet événement est sans aucun doute peu courant, mais plusieurs occasions se présentent dans nos vies pour souligner les transitions que nous vivons, tel que je l’ai mentionné plus haut. Avec la renaissance des Tentes rouges, beaucoup de femmes ont choisi de souligner, de marquer les événements de leur vie, très souvent occultés par les grandes religions ou les demandes incessantes de notre vie quotidienne, en recréant des cérémonies pour souligner leurs rites de passage, s’offrir un soutien émotionnel lorsqu’elles ont des fausses couches, à la naissance d’un enfant, lors des premières menstruations ou encore l’arrivée de la ménopause et tous ces changements corporels qui l’accompagnent.

Si les cérémonies servent, pour moi, d’abord et avant tout comme contenant, comme espace sécuritaire aux émotions, ces célébrations servent également à assurer une transition psychologique, autant pour la personne qui est au cœur des célébrations que pour celles qui y prennent part. Les rites de passages soulignant les premières règles servent magnifiquement ce but, puisqu’ils permettent à la jeune fille de recevoir le statut de femme et comprendre ce que vivent sa mère et les autres femmes de son entourage, tout en permettant aux femmes de son entourage, à l’inverse, de prendre conscience que la jeune fille, leur fille, sœur, cousine n’est plus une enfant, qu’elle prend à son tour place dans la communauté de femmes qui sont dans sa vie.

Pour m’avoir organisé une cérémonie pour mes premières règles dans le cadre de ma formation sur les Tentes rouges offerte par Brigid’s Grove, je ne peux m’empêcher de penser que les cérémonies et rites que l’on organise dans notre vie servent également à créer un sentiment d’appartenance à sa famille, sa communauté. C’est le sentiment que j’ai eu pendant ma cérémonie, celui de ressentir, enfin, un lien d’attachement avec toutes les femmes de ma lignée, de mon histoire personnelle.

Ces quelques étapes m’amènent à intégrer de plus en plus régulièrement les cérémonies dans mon quotidien, ne serait-ce que pour répondre à un besoin, celui de me donner un espace pour mes émotions.